Se faire la belle
Elle marche dans la rue, s’arrête et repart
En sortie, visible, s’étonne. Elle apparaît
Accompagnée par tous ces gardiens de la paix
Qui sans maudire, la garde écartée, à part
La prisonnière en déplacement enchaînée
Au faire, l'esclave donnée en magnitude
Aux altesses de ce royaume d’altitude
Où c’est sa prison qui se déplace entraînée
Avec elle, en sa cellule enfermée au corps
Elle est la princesse dans son alcôve en chambre
Elle y rêve de sortir, se montrer en ambre
Translucide où elle ne cacherait ce corps
Sa prison a été revêtue des atours
De ce quartier où elle habite, elle s’efface
Pour y montrer un mur habillé en préface
Introduction de circonstance à l’autour
« Ma fille, tu es », sa mère vient au parloir
Toujours la remettant en place où est son rôle
« Tu sais. Je ne veux voir, ni entendre ces drôles
Dire tu es un monstre qu'aucun ne veut voir »
La belle pleure sans larme « Je suis ainsi.
Je ne blesse personne pourquoi me punir ? »
« La punition est si tu oses sortir
ne laisse pas d'alternative à l’imprécis »
Sa mère répète « Le monde en a besoin »
« L’ordre est pour trouver sa place en société.
Le bon goût se valorise en sobriété »
Sa fille est dévouée, soumise à ses bons soins
« Je suis ta mère, je te veux une vie belle
Dans laquelle tu es indéniable en forte
Place, fais fi de la folie que tu emportes
Tu es absoute par contumace sans elle »
Laissée à sa méditation sur son crime
Elle regarde par les lucarnes barrées
De sa cellule, elle aperçoit ces gens parés,
leur envie la vie en miroir pour être en rime
Sans jamais déranger cet ordre de la rue
« Sois belle, ma fille », « Sois fort mon fils » Ils disent
Au miroir, elle voit ce monstre qu’ils méprisent
Là solitaire, elle pleure des larmes nues
La question tourbillonne en elle « Pourquoi ? »
Sa prison est appréciée et reconnue
On lui prête un charme dans ses parties charnues
Elle s’amuse à jouer le jeu, ils sont cois
Aux spectateurs de sa comédie rejouée
Bien apprises, ses scènes répétées en boucle
Dans cet infini millimétré, l’escarboucle
Se montre à leurs yeux en un joyau enjoué
Pourquoi ? Elle ne comprend pas l'imagerie
Son âme se voit, s’aime en jeune femme belle
Libérée d’un joug lourd pour ses épaules frêles
Elle est un monstre tenu en cachotterie
« Maman, je suis ta fille. Je veux pouvoir l’être »
« Non, tu ne peux l’être car ton sort sera pire
Ma sirène, tes pas seront pour toi une ire
Dans chaque instant, mille douleurs vont apparaître »
Elle obéit religieusement aux dures
Lois en opinions pour réussir sa vie
Elle cherche, trouve et se motive d'envie
« Je ne peux pas décevoir son espoir qui dure »
« Ma fille, crois-moi bien. Tu seras désirée »
Forte de l'identité durement forgée
Dans un caractère endurci à l’âpreté
Elle trouve des êtres, est considérée
Reconnue en place dans l'habit quotidien
Elle construit une vie en l'absence d'elle
Sa folie étouffée en cocotte éternelle
Le couvercle de plomb est son propre gardien
Normal, car elle n'est pas alors elle explose
Libérant cette pression accumulée
Sa soupape de sécurité acculée
Dans la compulsivité, sa folie s'expose
Les miroirs ne se reconnaissent plus en elle
Elle ne se reconnaît plus dans les miroirs
Elle tente de se renvoyer au dortoir
Désespérément, cherche à se couper les ailes
L’impossible déni n’a qu’une issue, la mort
Elle doit se tuer pour exister conforme
Au bonheur d’une vie vécue dans cette forme
Qu’elle n’aura jamais car sa folie la mord
« Maman, j’ai essayé, mais je ne le suis pas
Tel mon corps dit, s'il vous plaît entendez mon âme
J'ai besoin de vivre ma vie, être une femme
Autre que la procuration n’admet pas »
« Mon fils, j’ai échoué à t’aider. J’ai failli
Je ne peux accepter d'être mauvaise mère
Ton choix inacceptable fait que je m'y perds
Je ne peux pas perdre mon enfant accueillit »
« Maman, non, tu as bien rempli ta mission
Tu as réussi ton fils et tu ne pouvais pas me réussir
Moi, ta fille, maman. Je suis une femme.
Ma prison est mon corps et j’ai pris perpète »
Mer 16 Sep - 2:15
